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Le regard du cavalier : le reflet des intentions

Ou se porte votre regard, se porte votre intention.

Le regard est bien plus qu’un simple outil sensoriel. A cheval, c'est un dialogue silencieux entre deux âmes en mouvement. Il est un miroir, une passerelle subtile entre les êtres, un fil conducteur par lequel passent nos intentions, nos émotions et notre énergie. Dans l’art équestre, où deux âmes, celle du cavalier et celle du cheval cherchent à s’accorder, le regard devient un vecteur essentiel d’harmonie et de compréhension.

Le regard, loin d’être simple capteur d'image, est également énergie. Là où nous dirigeons nos yeux, nous orientons également notre esprit et notre intention. En équitation, ce principe prend une dimension particulière : lorsque le cavalier détourne son regard ou le fixe ailleurs, il risque de rompre ce lien subtil qui unit son corps, son esprit et son cheval.

Regarder “au loin”, comme on l’entend souvent, est nécessaire pour anticiper la trajectoire et les obstacles, mais cela ne doit jamais se faire au détriment du dialogue intime entre le cavalier et sa monture. En regardant au loin de manière continue, vous rompez le fil qui vous relie à la conscience du cheval.

Le regard porté entre les oreilles du cheval, dans cette zone qui semble presque sacrée, incarne une intention partagée, une communion d’énergies qui aligne les volontés des deux partenaires.

Lorsque nous discutons avec quelqu'un, nous le regardons. Il doit en être de même à cheval. La clé de la communication réside dans ce lien dont le regard révèle la réalité.

Le regard n’est pas seulement un vecteur d’énergie ; il est également un langage silencieux. Il traduit ce que les mots ne peuvent dire, ce que les aides physiques ne peuvent exprimer. Lorsque le cavalier pose son regard entre les oreilles de son cheval, il transmet à la fois attention, écoute et respect.

Nuno Oliveira, maître incontesté de l’équitation, portait son regard là, entre les oreilles de ses chevaux, non pas par simple habitude, mais parce qu’il comprenait que c’était un point de résonance. Ce regard ancré traduisait sa volonté de rester en dialogue constant avec l’intelligence du cheval. Ce n’était pas un simple coup d’œil distrait, mais une présence totale et sincère, un regard d’âme à âme. C'est l'esprit de la Présence.

Certes, l’équitation exige aussi une attention à l’environnement extérieur. Un cavalier ne peut ignorer les obstacles sur son chemin, les variations de terrain ou les autres cavaliers. Mais cette vigilance ne doit jamais rompre le fil invisible tendu entre son regard et celui de son cheval. Regarder à l’extérieur tout en maintenant ce lien intérieur est un exercice d’équilibre, une forme de discipline mentale qui transforme le cavalier en un guide serein et attentif.

Détourner le regard vers des distractions ou des pensées personnelles revient à briser le dialogue. Un cavalier qui ne regarde plus son cheval ne l’écoute plus non plus. Il impose alors un monologue où les locutions du cheval, ses réactions, son état émotionnel, ses ajustements subtils, passent inaperçues.

L’équitation n’est pas une dictature ; elle est une conversation. Et comme dans toute conversation, l’écoute attentive est essentielle de part et d'autre. Le regard est une partie intégrante de cette écoute, car il capte les nuances invisibles, ces infimes signaux qui révèlent l’état d’esprit du cheval.

Le regard entre les oreilles du cheval est aussi une invitation à l’introspection. Il force le cavalier à rester ancré dans l’instant, à aligner ses propres pensées, émotions et mouvements avec ceux de sa monture. Cet alignement ne peut se produire que dans la clarté, la sincère et la pureté du regard. Le regard signe le niveau de vérité et de certitude des paroles prononcées.

Le regard du cavalier devient alors un miroir, un reflet de son âme. Un cheval, hypersensible par nature, capte immédiatement l’hésitation, la peur ou la colère dans le regard de celui qui le monte. À l’inverse, un regard apaisé, confiant et bienveillant devient un guide pour l’animal, un point de repère qui le rassure et l’oriente.

Les grands écuyers du passé, qu’il s’agisse de Nuno Oliveira, de François Baucher ou encore des maîtres de l'équitation classique, comprenaient que l’équitation dépasse le simple domaine physique. Pour eux, le regard n’était pas un détail technique, mais un élément fondamental de la relation avec le cheval.

Nuno Oliveira enseignait que “le cheval ressent ce que vous pensez”. Si vos pensées sont dispersées, si votre regard s’égare, le cheval perd son propre équilibre émotionnel. En revanche, un regard posé avec calme et détermination entre ses oreilles agit comme une boussole, orientant et harmonisant ses mouvements.

Par la qualité du regard, vous pouvez devenir instantanément "référent" ou "suiveur". Leș signes gestuels ne sont en fait que l'expression des intentions du regard.

Le regard du cavalier, lorsqu’il est bien orienté, ouvre un espace de communion privilégié. Il devient un pont entre deux êtres intelligents, entre deux consciences qui s’accordent. Dans cet échange, il ne s’agit plus seulement de diriger ou de contrôler, mais de créer ensemble, de danser à l’unisson sur un chemin de compréhension mutuelle.

Ainsi, l’équitation cesse d’être une simple discipline pour devenir un art, un voyage partagé où chaque regard posé entre les oreilles du cheval est une promesse d’écoute, de respect et de complicité. Comme le disait Nuno Oliveira : “L’art équestre commence là où la mécanique s’arrête.”

En cela, le regard représente l'expression de la cause formative.

Comprenne qui pourra.


Francis Stuck






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